SAMEDI
Me voilà, seul, à la gare de St-Brieuc. Ce n’est pas la première fois que je foule les rues de St-Brieuc. L’année dernière, les anglais d’Editors m’avaient entrainé à prendre mon billet pour Art Rock. Cette année Bloc Party. A croire que les britons rythment ma vie. Je redécouvre donc les lieux. Peu de changements, si ce n’est une place Poulain-Corbion agrandie où deux écrans géants ont pris position. Plutôt une bonne nouvelle au vu de l’affluence au cœur de la cité briochine. Le soleil brille, et me voici au parc des promenades à zieuter une séance de yoga.
Rapide détour au village du festival pour récupérer mon pass média puis il m’est temps d’enchainer musique, expositions et gastronomie.
15h00, je lutte pour trouver une place dans un forum rempli à craquer. Pourquoi ? Pour les anneciens de Coming Soon, jeune groupe anti-folk rappelant les Moldy Peaches. Malgré une chaleur étouffante, le concert est plaisant à souhait. Les douces ballades quasi enfantines captivent un public très varié. Leur prochain album, qui sortira début septembre, s’annonce déjà délicieux aux écoutes convaincantes des nouveaux morceaux.
Le concert fini, je m’oriente vers la bibliothèque de St-Brieuc pour assister à une conférence musicale de Christophe Brault. « Les pionniers de la musique électronique », sujet intéressant enseigné par un passionné, mais malheureusement j’arrive trop tard et Grand Master Flash clos le colloque. Dommage. Je me rabats donc sur une galerie de photographies signé Renaud Monfourny. Une vingtaine de portraits de chanteurs français allant du regretté Bashung au déjanté Katerine.
Le temps m’est compté, et je me dirige au musée de la ville pour une exposition d’art numérique. Une longue file d’attente se dresse au seuil de l’entrée. Bon … ce sera pour demain …
Les festivaliers commencent à envahir la place Poulain-Corbion, et j’attends paisiblement à l’intérieur de l’espace presse le début des hostilités. A peine ai-je le temps de finir de lire le programme de la soirée, qu’Ebony Bones entre sur scène. Coupe afro et accoutrement fluo, elle répand son nu-clash, un mix d’hip hop, d’électro et d’afro beat. On ne peut alors que penser à des artistes tels que M.I.A, Santigold ou même Basement Jaxx. Le public jusqu’à alors dispersé va finalement se rassembler en fin de concert pour danser sur une reprise réussi du Seven Nation Army des White Stripes. S’en suit les évidents (et gavants) « pô-pô-pô-pôôôôôô-pô », ce qui aura au moins le mérite de réveiller les festivaliers. Au final, le concert reste une bonne surprise malgré le bémol d’une énorme et frustrante erreur de timing (sachant qu’Ebony Bones est l’artiste idéale pour clôturer une soirée).
Changement radical de sonorités avec l’arrivé de Pascale Picard, chanteuse québécoise qui se veut folk. Je ne connais rien d’elle excepté quelques singles insipides écouté la veille à la va vite. Le concert, d’un ennui prodigieux, me contraint à m’assoir et feuilleter un magazine. Et ce n’est pas sa gonflante reprise du Glory Box de Portishead qui m’encouragera à me relever. Les canadiens nous ont habitués à mieux …
Tête d’affiche inattendue de la soirée au vu de son récent succès, Charlie Winston s’installe sur scène sous une hallucinante ovation du public. Et pourtant, alors que la nuit s’installe, je m’ennuie ferme. Cette fois ci, c’est du à ce chanteur anglais fastidieux que mes allers retours entre l’espace presse et la scène se font. Les titres s’enchainent, se ressemblent, il est temps pour moi de faire une pause.
L’exposition d’art numérique que j’avais prévu demain se fera finalement durant la fin de set du hobo … Et à ma grande surprise, deux-trois personnes seulement dans l’enceinte du musée. Je peux donc profiter pleinement des différentes activités mises en place. Le ludisme des productions est agréable, parfois poétique comme l’Akoumasflore du Scenocosme, petit jardin musical réagissant à nos mouvements ou tout simplement délirant avec le Digital Puppetry de l’allemande Tine Papendick.
Retour place Poulain-Corbion. Tricky va prestement commencer son concert. J’attends beaucoup de ce set après le passage à vide du début de soirée.
Le « kid de Bristol » se présente enfin au public. De dos. Le son est fort, la musique poignante, et le jeu de lumières dresse une ambiance frénétique. Seulement voilà, la fatigue commence à me gagner, et Tricky et sa superbe choriste n’y peuvent rien. C’est dont avec des regrets que je quitte cette première journée assez inégale.
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DIMANCHE
Dimanche, nouvelle et dernière soirée place Poulain Corbion.
J’arrive juste à temps pour ne rien rater du concert de Maxïmo Park. Le quintet de Newcastle, réputé pour ses prestations live, entame énergiquement son set. Paul Smith, leader à chapeau, se démène sur scène pour remuer le trop peu de public présent. Au fur et à mesure, le concert perd malheureusement en ardeur, et il faudra attendre les dernières chansons pour apprécier un nouveau souffle. Dès lors, les tubes s’enchainent, les festivaliers s’enthousiasment, et ce n’est pas les quelques problèmes de sons qui paralyseront le groupe. Paul Smith se donne du début à la fin, et à lui seul fait oublier les quelques titres dispensables du concert.
C’est dans un magnifique théâtre à l’italienne que le canadien Chad VanGaalen me donne maintenant rendez vous, où comment éviter Anaïs place Poulain Corbion. Découvert en début d’année, je fus agréablement surpris de le retrouver programmé à Art Rock. C’est donc conquis d’avance que je m’installe au balcon d’un petit théâtre rempli à craquer. Le grand (par sa taille et par son talent) Chad VanGaalen, banjo en mains, délivre au public de douces mélodies, non sans rappeler le brillant Sufjan Stevens.
Transporté par la magie VanGaalen, le retour place Poulain Corbion m’est difficile. Surtout quand on sait que les electro-pop-fluo Ting Tings prennent le relais. Pas que je n’aime pas leur musique, mais il faut admettre qu’on passe du coq à l’âne. Les festivaliers se pressent en masse devant la scène, Katie White et Jules de Martino peuvent mettre leur imparable machine à tubes en marche. Rarement ai-je vu, durant ces deux soirées, le public aussi réceptif. Avec seulement un album au compteur, les Ting Tings arrivent à enchainer les morceaux sans passages à vide, les hymnes pop de that’s not my name à shut up and let me go exaltent une foule qui ne cesse de danser. Contrat rempli.
Tête d’affiche du weekend, Bloc Party est chargé de clôturer le festival. Souvent attaqués sur leurs fébriles exercices scéniques, ce soir les quatre anglais font mentir les critiques. Plus affirmés que jamais, les anglais allient les tubes de leurs début (banquet, helicopter) aux perles electro rock du nouvel album (mercury, talons). Les enchainements harmonieux, marque d’une irréprochable maitrise, entrainent les festivaliers à ne cesser de frapper des mains. Helicopter sonne le glas du concert, Kele Orekeke salue une dernière fois la foule, et moi Art Rock…au moins, jusqu’à l’année prochaine.